Les applications peuvent-elles nous aider à mieux manger ?
Dans une étude publiée en novembre dernier dans la revue Nutriments, les chercheurs ont montré que les utilisateurs perdaient du poids après avoir utilisé une application de nutrition pendant trois mois. Si cela semble être une excellente nouvelle, tous ces programmes sont-ils créés égaux ?
Pour la nutritionniste et nutritionniste Sylvie Dolhabaratz, « D’une manière générale, les applications minceur sont des calculatrices de calories. Manger 500 calories de gâteau n’est pas la même chose que manger 500 calories de haricots verts et de steak. Il y a un effet de matrice alimentaire : l’apport en fibres a un effet différent sur notre corps que de ne pas manger de fibres. » Dans la plupart de ces applications, il n’y a pas de notion d’équilibre nutritionnel, encore moins de prévention des aliments ultra-transformés. Cependant, de nombreuses études ont montré un lien entre leur consommation et l’obésité. Les fabricants simplifient à outrance les conseils nutritionnels.
risque psychologique
« Le risque de ces applis, c’est qu’elles deviennent envoûtantes, addictives. Les non avertis suivent de près les recommandations », poursuit la nutritionniste. Pour perdre du poids, les utilisateurs placent tous leurs espoirs dans des applications qui comptent chaque calorie, graisse ou glucides dans leur assiette. La nourriture devient alors une chose calculée, une contrainte plutôt qu’une source de plaisir. Mais consommer moins de calories n’est pas forcément la bonne solution, surtout si l’on ne respecte pas une alimentation équilibrée. Nous savons tous que si vous vous privez trop, vous finirez par craquer. « Notre organisme est complexe et il y a de nombreux facteurs à prendre en compte si l’on veut perdre du poids : sommeil, émotions, psychologie, stress… », précise Sylvie Dolhabaratz. « Des applications comme celle-ci sont mieux utilisées avec un support expert ».
Yuka, Openfoodfact, Nova : Une bonne alternative aux applis de régime ?
En plus des programmes de perte de poids, il existe des applications conçues pour tenir les consommateurs informés des produits qu’ils achètent. Yuka se concentre sur les additifs, Openfoodfact utilise les données de notation Nutri et Nova fournit un indicateur du niveau de transformation des aliments. « Ces applications peuvent être d’excellentes options, tant que vous en avez quelques-unes et que vous ne vous concentrez pas dessus pour éviter l’addiction », prévient la nutritionniste. Le risque est de se priver d’aliments diabolisés par les scores de ces logiciels. Par exemple, les consommateurs diront que le beurre et les huiles, et même certains fromages, devraient être exclus parce qu’ils sont considérés comme trop gras, alors qu’ils ont une valeur nutritive. Les applications, comme Nutri Score, ne tiennent pas compte de la proportion avalée.
« Le problème avec Nutri Score et les applications qui l’utilisent, c’est que les fabricants se sont adaptés si rapidement. Ils ont remplacé le sucre par d’autres types de glucides et ajouté des vitamines et des minéraux pour augmenter le score. La poudre de cacao finit donc par obtenir un Nutri Note de B, même si c’est très doux et ultra travaillé », regrette Sylvie Dolhabaratz. Ces applications ne peuvent que rattraper l’éducation et la disparition de la culture alimentaire et ouvrir le champ aux industriels.
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perte de culture alimentaire
Pour les nutritionnistes, ces applications ne sont pas un bon substitut à l’éducation alimentaire. Avec plus d’heures de travail, moins de sommeil et l’omniprésence des écrans, le shopping, la cuisine et donc une alimentation saine passent au second plan. D’autant plus que cette culture alimentaire est en train de disparaître. « L’héritage de la cuisine familiale est rare, on ne nous apprend plus à aimer la nourriture, à goûter la nourriture, à cuisiner. Des cultures entières disparaissent et il n’y a plus de transfert des aspects fondamentaux et importants de la nourriture. Les industriels profitent de parce qu’ils proposent des aliments crus », déplore la nutritionniste.
Selon les nutritionnistes, la seule façon de redonner du goût à votre alimentation est d’améliorer vos compétences dans ce domaine. « La solution la plus efficace pour prévenir le surpoids et l’obésité reste l’école. Nous avons besoin de nutritionnistes et de nutritionnistes qui viennent enseigner car ils ont les dernières connaissances en nutrition », conclut Sylvie Dolhabaratz.