Grenoble/La source de ce labo sur Nutri-Score


A, B, C, D, E Le logo en cinq couleurs, apposé sur la plupart des emballages alimentaires, fait désormais partie de notre quotidien. Le Nutri-score, étiquette nutritionnelle simplifiée visant à modifier les comportements des consommateurs, a été formalisé en octobre 2017 dans le cadre d’une loi de modernisation du système de santé, et l’une de ses sources était le Grenoblois Bernard Ruffie (Ruffieux). Le professeur à l’école de génie industriel INP de Grenoble et fondateur du Laboratoire d’économie appliquée de Grenoble (Gael) revient sur cette aventure et nous parle du projet en cours sur l’affichage environnemental des aliments.

« Nous avons fait des expériences avec Nutri-Score, qui étaient un peu cachés pour des raisons politiquesse souvient Bernard Ruffieux. À l’époque, le ministère de la Santé était confronté à des groupes de pression de l’industrie et à une arène internationale, notamment le Royaume-Uni, qui proposaient des logos alternatifs. Il y a un gros conflit entre ces formats. Marisol Touraine a alors annoncé qu’elle mènerait une expérience nationale et que le modèle gagnant serait son choix. En politique, elle s’est placée dans les bras de la science. »

600 bénévoles

Une expérimentation nationale a été menée dans une soixantaine de supermarchés, apposant près de 2 millions d’étiquettes et observant 1,6 million d’achats. Pendant ce temps, le laboratoire de Gale a mené sa propre expérience, en utilisant la méthode de la « double différence », avec 600 volontaires. « J’ai dit au directeur général de la Santé, Benoît Vallée, que j’étais sceptique sur les résultats de l’expérience nationale. Je lui ai alors proposé de faire une expérience en laboratoire en parallèle de manière un peu cachée. Enfin, deux études ont conclu que Nutri- Le score est le meilleur et c’est le ministre qui l’a choisi. »

Bernard Ruffieux, fondateur de Gale Labs. © Grenoble INP – UGA

Sur la base de ses travaux sur le Nutri-Score, le laboratoire de Gale est toujours impliqué dans une nouvelle expérience économique sous la direction de Bernard Ruffieux, qui a impliqué 600 volontaires entre juillet et septembre. Cette fois, ils sont liés au projet de vitrine environnement alimentaire porté par l’Ademe et le ministère de la Transition écologique.

« Le Nutri-Score a servi de référence dans cette histoireBernard Ruffieux a témoigné. Étant impliqué dans son développement comportemental, j’ai été réuni par le directeur scientifique de l’Inrae, Louis-Georges Soler, qui présidait le comité scientifique lors de sa constitution. L’objectif est d’élaborer des politiques publiques fondées sur la science. »

pas de consensus

Contrairement au Nutri-Score, il n’existe pas à ce jour de format concurrent pour les labels environnementaux alimentaires. De plus, il n’y a pas de consensus sur la portée des termes environnementaux, avec des enjeux économiques, politiques et culturels majeurs.

« Lorsque nous avons expérimenté à Grenoble, nous avons essayé d’articuler un format de fabricationdit Bernard Ruffieux. Nous avons voulu voir dans quelle mesure le fait d’ajouter des informations permet aux consommateurs de faire de bons choix. On a discuté de l’arbitrage entre CO2, biodiversité, santé… Le ministère de la santé nous a dit qu’on ne pouvait pas traiter de la toxicité sur les étiquettes d’impact environnemental car si la nourriture était toxique, elle serait interdite. Les consommateurs ne doivent pas être amenés à croire que le produit est plus ou moins toxique. Nous avons essayé un format d’étiquetage plus simple que le Nutri-Score. Aujourd’hui, les logos restent à définir. »

Le rapport du comité scientifique du 4 janvier détaille ses recommandations et les mesures à prendre à court et moyen terme pour définir l’étiquette environnementale. « Désormais, c’est entre les mains des politiciensBernard Ruffieux conclut. Ce serait intéressant si nous pouvions être le fer de lance du logo. Mais le débat sera long et amer. Quant au Nutri-Score, l’enjeu des 3 ou 4 prochaines années, c’est l’Europe. Le mettre en œuvre à l’échelle européenne serait bon pour notre gouvernement. »

Quant à un seul marqueur nutritionnel/environnemental, la perspective semble lointaine. A moins que les géants du numérique ne devancent les pouvoirs publics sur ce dossier.

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