Entretien avec Charlotte Jean, fondatrice de Darwin Nutrition et Euphoria Chocolat


Charlotte Jean, fondatrice de Darwin Nutrition et Euphoria Chocolat, pouvez-vous nous décrire votre parcours et votre entreprise ?

Franco-Péruvienne, j’ai grandi en aimant les voyages, la culture et la nature. Ma mère est amazonienne et militante écologiste, et j’ai eu la chance d’être très tôt sensibilisée aux enjeux écologiques.

Passionnée d’art et d’histoire, mon parcours académique ne me ressemble pas du tout ! Après ma préparation au Louvre, je suis devenu journaliste et portraitiste pour Beaux Arts Magazine et Éditions.

Attention, c’est un peu cliché ! Il y a deux ans et demi, mon ami Quentin Molinié et moi quittions Paris pour un voyage avec des sacs à dos. Intérêt grandissant pour l’alimentation et ses enjeux, nous avons mis en place un média digital native, Darwin Nutrition, où nous partageons des documents sur la bonne alimentation, des conseils pour favoriser le bien-être, des recettes, des podcasts et des reportages de producteurs qui nous inspirent. Nous avons maintenant plus de 100 000 lecteurs mensuels et venons de publier un livre qui comprend Mango, Beneficial Foods – 50 Nature’s Treasures for our Health.

Je continue à écrire pour les médias artistiques et culturels car je ne veux pas me focaliser sur un seul domaine, ce qui est pour moi une nécessité intellectuelle. Je travaille sur mon prochain livre sur la légende amazonienne qui a bercé mon enfance.

Alors, et le chocolat dans tout ça ? Il y a dix ans, au Pérou, mon père a commencé à cultiver des cacaoyers criollos en agroforesterie. Près du village où ma mère est née, sur les rives de la rivière Varaga dans le bassin supérieur de l’Amazone. C’est le berceau des cacaoyers ! Quand j’étais étudiant, je travaillais à Via Chocolat, une chocolaterie parisienne, et je passais toute la journée à vendre (et à manger !) des chocolats fins et au-dessus de mes moyens, tout en rêvant de créer le mien. Un rêve qui ne m’a jamais quitté !

Pendant le confinement, mon copain et moi avons commencé à réfléchir sérieusement à ce projet. C’est ainsi qu’Euphoria Chocolat est née !

Notre chocolat est l’un des rares à passer de l’arbre à la barre, ce qui signifie que nous contrôlons toute la chaîne de l’arbre à la barre.

Il est écologique : notre cacao est cultivé sur une petite plantation en agroforesterie, et d’autres arbres le nourrissent, le protègent et lui donnent son arôme fruité.

C’est cru : nos fèves ne sont pas torréfiées pour conserver les nutriments et l’arôme naturel du cacao.

Très bon : notre cacao appartient à la variété Criollo, la variété la plus rare, sans amertume.

SANTÉ : Un docteur en pharmacie naturopathe a formulé nos 3 chocolats, dont du gingembre, de la maca ou du cacao pur, pour obtenir la dose journalière recommandée pendant le traitement. Les pourcentages varient entre 80% et 90% de cacao, et on ajoute un peu de sucre de bouleau, un sucre à index glycémique bas.

Enfin, il est commercialisé en quantité limitée chaque année, en fonction de la récolte. Nous produisons sur mesure ! Vous pouvez le commander jusqu’au 28 juillet sur notre page ulule, qui propose également une courte vidéo sur le projet.

Selon vous, qui sont les futurs acteurs de l’innovation alimentaire française ?

En France et ailleurs, ces personnes vont être essentiellement les acteurs de la transition alimentaire, elles vont favoriser le développement et un meilleur accès à l’alimentation locale et bio, tout en permettant de remplacer l’essentiel des protéines animales par des protéines végétales. Il peut s’agir d’un petit producteur de spiruline dans le Lot, ou d’une ferme urbaine regroupant plusieurs start-up, comme La Caverne à Paris.

En fait, je pense qu’il y a quelque chose dans « l’innovation alimentaire » qui me dérange. Considérons deux grands thèmes pour notre santé et l’environnement : les pratiques agricoles et les aliments ultra-transformés.

Améliorer le premier, le rendre plus écologique et éthique, ne passe pas nécessairement par des innovations et des solutions de haute technologie qui exacerbent souvent l’agriculture et nuisent à la biodiversité et à notre santé. Une approche systématique de l’agriculture durable visant à créer des écosystèmes et à respecter la biodiversité remonte aux années 1970. Prendre soin de la planète, des personnes et du partage équitable : Trois éthiques de la permaculture doivent être considérées dans toute « innovation ». Les acteurs des futures innovations alimentaires seront ceux qui en feront la norme !

Concernant la deuxième question. Aujourd’hui, nous voyons le logo AB sur la pire boîte de gâteaux ou de charcuterie. Cela ne peut que nous induire en erreur ! Nous pensions qu’il était bon pour nous de manger bio et/ou végétal, mais nous avons fini par manger un steak végétal ultra-transformé avec du sucre et des additifs nocifs pour notre santé, et le soja était responsable de la déforestation au Brésil Le coupable. ..on commence à comprendre les dangers des aliments ultra-transformés, de l’obésité, du diabète, du cancer, des maladies chroniques pour notre santé, mais ceux-ci imprègnent même l’allée dite « santé ». Les acteurs des futures innovations alimentaires dans ce domaine sont ceux qui simplifient au maximum la liste des ingrédients tout en restant le plus naturel possible.

Quels sont les facteurs clés de succès d’une entreprise comme la vôtre ?

Le premier facteur clé est de trouver un public prêt à s’étonner que ceux qui achètent notre chocolat puissent accepter le goût du cacao cru, plus original, plus naturel et plus végétal. Aujourd’hui, le goût du chocolat s’est standardisé, et la saveur naturelle des fèves, riche, riche et variée, est méconnue du grand public. Il faut se surprendre et changer d’attitude envers le chocolat !

De plus, nous avons l’habitude de payer 2,50 euros des tablettes de chocolat industriel à base de sucre de mauvaise qualité et de cacao peu aromatique et à haut rendement, parfois cultivé par des enfants dans des régions déboisées d’Afrique de l’Ouest.

Face à ce produit normatif, nos prix peuvent sembler élevés. Nos coûts sont transparents : production de cacao en agroforesterie, rémunération des planteurs, entretien des plantations, transport, achat des autres matières premières, chocolatiers haut de gamme et artisanaux en Île-de-France, conditionnement, avis scientifique de France avec nous Des docteurs en pharmacie naturopathe qui élaborent ensemble des recettes, gèrent les dépenses, etc.

Il faut trouver un public déjà un peu sensible. Pour l’écologie, le bien-être, la nutrition… et prêt à booster la qualité et la rareté.

Plus tourné vers l’avenir, si le projet grandit et qu’on a besoin de plus de cacao, il faudra réfléchir à un nouveau modèle et gérer les achats différemment. Par exemple, nous pouvons faire appel à d’autres petites plantations agroforestières aux normes strictes basées sur l’écologie, l’éthique et la qualité des arômes.

Enfin, il y a un facteur plus personnel. Tout comme le criollo, la variété de fèves de cacao que nous cultivons est à croissance lente et mon approche de ce projet est plutôt lente. Le cacao et le chocolat sont une passion et mes produits sont adaptés à la récolte et à la commande. Il ne s’agit pas de démarrer une startup ou de travailler à 200% sur une marque. Une des clés du succès est donc de pouvoir cumuler mes différentes activités sans aucune pénalité et de travailler à un rythme qui me convient.

Personnellement, quelles autres innovations alimentaires aimeriez-vous inventer ?

Je ne suis ni scientifique ni ingénieur, donc quand il s’agit d’innovation, je pense plus politiquement. Comment parvenir à la démocratie alimentaire ?

Le premier sujet qui m’intéresse est la démocratisation de l’accès aux connaissances sur l’alimentation et la nutrition. Diffusant le message alimentaire au maximum de volume, nous sommes humblement impliqués avec Darwin Nutrition, mais il reste encore un long chemin à parcourir.

Pour aller plus loin, il y a un projet qui m’a récemment interpellé et qui, je pense, constituera une réelle avancée : la mise en place de la sécurité sociale alimentaire. Cette nouvelle branche de la protection sociale nous permettra de lutter contre l’insécurité alimentaire et de protéger notre santé tout en engageant la transformation agro-écologique.

L’idée envisagée par plusieurs associations est que nous soyons remboursés à l’avance de nos repas. Certains producteurs contracteront sur la base de normes éthiques et de durabilité, et certains aliments très sains seront remboursés. Tout le monde devrait avoir le droit de bien manger, pas seulement les bobos…

Plus d’informations sur www.darwin-nutrition.fr

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